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Avez-vous ces traits d’une personnalité addictive?

Avez-vous une personnalité addictive ? Est-ce qu’elle existe vraiment et d’où vient-elle ?

Il est plus facile d’éteindre un premier désir que de satisfaire tous ceux qui le suivent.
François de La Rochefoucauld


Comprendre l’addiction

Pendant longtemps, l’addiction a été nommée de bien des façons différentes, une faiblesse morale, un manque de volonté, une maladie spirituelle, une incapacité à faire face à ce monde… Quel que soit l’objet de l’addiction, la personne dépendante essaye d’échapper à la réalité. A travers l’objet de l’addiction, elle essaye de contrôler l’instabilité et l’incertitude du présent. Au début elle y arrive, puis progressivement l’addiction prend le dessus.

Comme bien d’autres maladies, l’addiction évolue en silence. En réalité, cette maladie arrive à l’état critique bien avant que l’addict lui-même ou son entourage ne se rendent compte de la gravité du problème.

Tout commence quand la personne fait l’expérience d’un changement d’humeur en consommant une substance (nicotine, héroine, sucre, alcoo) ou en faisant une expérience (jeu, sexe, sport, vol…):

  • votre humeur est reboostée quand vous faites des achats en ligne (acheteur compulsif)
  • vous êtes détendu et enjoué quand vous avez bu (alcoolique)
  • vous êtes excité parce que vous avez gagné au casino (joueur compulsif)
  • vous êtes soulagé des émotions négatives quand vous avez mangé du sucre (accro à la nourriture)

 

Le changement d’humeur donne l’illusion du contrôle, du confort ou encore de perfection. La façon dont on se sent change. Ainsi, dans toute addiction, la personne se tourne vers un objet pour ressentir un soulagement et un peu d’intimité.

Au lieu de se tourner vers soi-même ou vers les autres, l’addict développe une relation avec un objet (drogue, nourriture) ou un événement (jeu, sexe, vol). Ainsi, pour une personne dépendante, le moindre sentiment d’inconfort est un signe pour se tourner vers sa drogue et non vers son entourage ou sa propre spiritualité.

La personnalité addictive est créée à partir de la répétition de ce comportement. Elle émerge en quelque sorte du processus addictif. Ce n’est pas une prédisposition génétique.

Autrement dit, notre personnalité se dédouble en créant un alter-ego addict. De cette façon, cet alter-ego est toujours avec nous. Plus le stade de l’addiction est avancé, plus l’alter-ego addict est fort en nous et plus sa voix domine et détermine nos choix.


L’addiction c’est NE PAS demander de l’aide

L’addiction est une chose mystérieuse.

Certains sont probablement plus susceptibles de développer une addiction ayant été fragilisés par leur éducation. En grandissant, ils n’ont pas été traités avec amour et respect, de telle manière qu’ils n’ont jamais appris à construire des relations saines avec les autres.

Si vous avez grandi dans une famille où la proximité et l’intimité n’étaient pas bienvenues, vous êtes plus enclin à développer une addiction.

D’abord, vous avez appris à vous distancer des autres. Puis en grandissant, cet environnement a laissé un vide en vous, un vide creusé par la solitude et le désamour. Vous allez désormais chercher à le remplir.

Pour remplir ce vide, vous n’utilisez pas la connexion avec les autres, votre propre force, votre communauté ou une force spirituelle. Au lieu de cela, vous développez une relation avec un objet ou un comportement.

Un enfant qui est délaissé pendant une soirée où ses parents alcooliques sont incapables de s’occuper de lui va chercher du réconfort dans la boîte à biscuits.

Un enfant qui grandit dans une atmosphère où il est constamment blâmé ou émotionnellement négligé est un candidat parfait pour développer une addiction.


La naissance du dragon rouge

L’abandon répété des valeurs personnelles au profit du comportement addictif va graduellement donner plus de force à l’alter-ego addict. Petit à petit, la voix de cet alter-ego devient plus forte de telle sorte que c’est elle que vous écoutez de plus en plus.

Imaginez un dragon rouge vous soufflant des pensées à l’oreille. La partie en vous qui n’est pas addict, le dragon bleu, devient de plus en plus difficile à entendre.

 

Avez-vous des pensées comme :

  • Je n’ai pas vraiment besoin de gens
  • Je n’ai pas à faire face à quelque chose si je n’ai pas envie
  • J’ai peur d’affronter la vie et les problèmes
  • Les objets et les événements sont plus importants que les gens
  • Je peux faire tout ce que je veux, quand je veux. Peu importe à qui ça peut faire mal

 

Ce système de pensée renforce la personnalité addictive, le dragon rouge. Par la suite, plus nous essayons d’y échapper, plus l‘addiction se développe et se renforce.

Le dragon rouge dit : “Donne-moi ta douleur, je la soulagerai.”

Traduction : “Donne-moi ta douleur, je te donnerai l’illusion du soulagement.”

Le dragon rouge dit : “Je vais t’apprendre une façon de ne pas faire face à tes problèmes.”

Traduction : “Tu peux te cacher temporairement, mais tes problèmes seront toujours là.”

Le dragon rouge dit : “Tu peux me faire confiance.”

Traduction : “Tu ne peux faire confiance à personne.”


Switcher les addictions

L’addiction au sucre est l’addiction la plus répandue dans le monde et probablement la plus difficile à surmonter. La plupart du temps c’est la première substance addictive avec laquelle nous rentrons en contact.

Cette dépendance peut durer toute une vie ou elle peut progresser vers d’autres substances (café, alcool, nicotine, médicaments) ou comportements (jeux d’argent, travail, shopping, jeux en ligne, sexe). En conséquence, switcher entre les objets d’addiction garde la personne dépendante dans la loupe addictive. Quelle que soit la drogue, le chocolat ou le whisky, si vous avez un vide à remplir, vous chercherez toujours à le remplir.

Toutes les dépendances sont liées. En ce sens, toutes les formes de dépendances doivent être abordées pour trouver une sobriété durable.

Certains préfèrent arrêter toutes les drogues du jour au lendemain. D’autres procèdent en éliminant les substances addictives ou les comportements petit à petit. Du reste, il faut rester vigilant pour ne pas retomber dans une autre addiction afin de masquer une douleur émotionnelle.


A quel stade êtes-vous ?

L’addiction est une maladie évolutive. Plus elle évolue, plus le mur que l’addict s’est construit autour se rigidifie et se complexifie. Ci-dessous vous pouvez lire un exemple de progression.

 

  • Stade 1

Toute relation addictive commence dès lors que nous essayons d’échapper aux sensations ou émotions négatives de manière répétée. Nous remplaçons graduellement une interaction naturelle humaine avec une relation à un objet ou un comportement. Alors qu’une relation est un échange émotionnel avec les autres, la relation addictive est une isolation émotionnelle. Un cycle addictif s’installe :

> nous ressentons un inconfort

> nous nous tournons vers notre objet d’addiction

> pendant un court moment, nous nous sentons mieux

> mais nous culpabilisons de notre comportement ce qui crée encore de l’inconfort

> nous revenons à notre objet pour soulager l’inconfort

et ainsi de suite

 

Notre alter-ego, la personnalité addictive émerge et prend forme. A certains égards, nous commençons à chercher la paix et le bonheur à travers le contrôle. En nous goinfrant de produits sucrés par exemple, nous avons l’impression de contrôler la situation. En ce sens, nous cherchons la perfection et le contrôle au lieu de l’humanité.

Le comportement reste dans les limites acceptées socialement. Mais déjà la logique addictive et les fondations des croyances se forment et se renforcent : la nourriture soulage infailliblement alors que les autres ne sont jamais parfaits.

De plus, cette étape est marquée par l’apparition d’une alimentation excessive, de désirs forts et d’un manque de contrôle constant sur la consommation d’aliments transformés. Il peut même y avoir de légers signes de sevrage lorsque la consommation de certains aliments est limitée.

À ce stade, il est encore difficile de faire la différence entre une dépendance alimentaire naissante, les déséquilibres hormonaux ou d’autres troubles du comportement alimentaire (boulimie, hyperphagie).

 

  • Stade 2

Le mode de vie change et s’adapte à l’alter-ego addict.

A ce stade, nous nous entourons seulement d’idées et de personnes qui sont conformes à notre addiction et nous nous éloignons des personnes qui pourraient menacer le dragon rouge. Certains préfèrent s’isoler complètement car le sentiment de honte est écrasant et évitent ainsi ne serait-ce qu’une allusion à l’intimité.

Les rituels autour de l’addiction se créent et de ce fait, elle devient un mode de vie. Nous commençons à mentir. Par exemple cacher de la nourriture, boire quelques shots en douce avant de rentrer à la maison, ouvrir des comptes en banque pour masquer les jeux d’argent, multiplier les rencontres pour avoir plus de sexe.

Ces rituels se développent. En cas de stress ou d’inconfort, les dépendants se tournent désormais vers ces rituels qui les soulagent.

Dans le cas d’une addiction à la nourriture, il ne faut pas oublier que la consommation répétée d’aliments transformés riches en sucre conduit à une neuroadaptation dopaminergique. Le système de récompense du cerveau devient désensibilisé, nécessitant de plus grandes quantités de nourriture pour atteindre le même niveau de plaisir. Ainsi, cette neuroadaptation contribue à la progression de la dépendance alimentaire.

Quand la personne dépendante se demande “quand est-ce que ça va s’arrêter ?”, la voix du dragon rouge répond “ce n’est pas si mal”.

 

  • Stade 3

A ce stade, l’alter-ego addict est en contrôle total. Après des années de comportement addictif, la dépendance a des conséquences réelles et graves sur la vie de l’addict. Toute sa vie commence à se décomposer.

Pour les accros au sucre, les troubles métaboliques sont importants. La consommation alimentaire se produit de manière compulsive malgré un plaisir ou une récompense minime et se caractérise par une perte totale de contrôle, une suralimentation et une incapacité à s’abstenir de manger de façon excessive. Bien que le plaisir ne soit plus le même, il est trop douloureux à présent de se passer de cette nourriture-drogue.

Ces stades sont bien illustrés dans la vidéo du début de cet article.


La voie de la guérison

Il y a longtemps, nous nous sommes tournés vers la nourriture pour soulager une douleur. Avec le temps, nous avons développé un autre problème: l’addiction à la surconsommation de produits transformés.

Nous avons tellement abusé de ces produits que ce n’est plus juste une habitude psychologique ou une technique de survie, la composition chimique de notre cerveau a aussi changé. Que pouvions-nous y faire ? Cette solution a toujours fonctionné, infaillible, jusqu’à nous attirer dans son piège.

S’extirper de notre schéma habituel est difficile. Les règles et les habitudes sont tellement ancrés que désormais, nous reproduisons la plupart d’entre elles inconsciemment.

Quand nous essayons de casser une de ces règles, nous nous sentons anxieux. En conséquence, nous avons alors envie de nous tourner vers notre solution préférée: manger du sucre. Mais c’est justement ce qu’il ne faut pas faire !

Casser les règles et adopter un comportement différent est un vrai challenge.

Ne plus ignorer nos vrais besoins, répondre à nos émotions avec bonté et gentillesse n’est pas un comportement dont nous avons l’habitude. Toutefois c’est peut-être la porte de sortie vers une liberté alimentaire.

Le processus de guérison se fait en plusieurs étapes. La perte de poids arrive d’ailleurs souvent en dernier. Ces étapes peuvent par exemple ressembler à:

  • accepter le fait d’avoir une addiction aux aliments transformés
  • prendre une décision ferme de changer
  • construire un système de support
  • identifier les règles et habitudes de survie mis en place à travers la nourriture
  • apprendre à demander de l’aide
  • abstinence des produits qui déclenchent les crises
  • écouter les émotions et les vrais besoins
  • re-apprendre les relations avec les autres
  • maintenir l’abstinence
  • identifier d’autres addiction potentielles
  • naviguer vers un mode de vie sain
  • travailler l’image corporelle
  • perdre du poids

 

A un stade très avancé d’addiction, des mesures plus drastiques s’imposent, quitte à utiliser des médicaments.

L’addiction ne se diagnostique pas à la légère. Prenez contact avec un thérapeute compétent.


Plénitude

Les facteurs psychosociaux tels que la violence, les abus sexuels et la négligence émotionnelle jouent certainement un rôle dans la dépendance. Que nous ayons en nous une “personnalité addictive” ou pas, nous pouvons néanmoins prendre nos responsabilités et trouver une solution constructive.

Jusqu’ici, nous avons essayé d’obtenir par la nourriture ce que nous voulons de la vie – la plénitude. Beaucoup parlent de vide qu’ils tentent de remplir. Le problème est que la nourriture ne sera jamais assez et a une capacité très limitée à répondre à nos besoins émotionnels et spirituels, voire aucune. Même avec nos estomac pleins, nous pourrions manger davantage si nous pouvions.

En revanche, une compréhension de soi-même et une proximité émotionnelle avec les autres apporte une plénitude d’âme, de l’énergie, un sens et un épanouissement. Le chemin vers la libération sera notamment d’être bienveillant avec nous-mêmes et de nous tourner vers les autres malgré nos peurs.


SOURCES

NAKKEN Craig, The Addictive Personality: Understanding the Addictive Process and Compulsive Behavior, Hazelden Trade, 1988

KATHERINE Anne, Food Addiction: The Brain Chemistry of Overeating, Gurze Books, 1997

Dr TARMAN Vera, One size does not fit all: Understanding the five stages of ultra-processed food addiction, Journal of Metabolic Health, 2024

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